ou quand la formation rock irlandaise s’est rendue à Berlin, encordée à Brian Eno, et a appuyé sur le bouton "redémarrer".
par Martin Aston
A l’écoute du son incomparable de la guitare de The Edge, du battement inimitable de la batterie de Larry Mullen Jr en intro de Achtung Baby, l’on peine à croire que, seulement un album plus tôt, la formation rock irlandaise U2 traînait avec BB King et se perdait dans le labyrinthe des racines de la musique américaine. Des groupes qui ont éclaté aux jours heureux du post punk ont fini dans des endroits pires que Rattle and Hum, mais U2 lui-même savait qu’il s’était égaré. Et c’est bien ce qui s’est avéré. Après s’être assuré d’avoir réservé Brian Eno et Daniel Lanois pour produire en 1984 son The Unforgettable Fire au sortir des bourrasques de War, le groupe rembauchait notre duo et décampait pour Berlin dans l’esprit physique et métaphysique de la renaissance assistée par Eno de David Bowie (à savoir Low, "Heroes" et Lodger) et appuyait sur le bouton "redémarrer".
Vingt ans plus tard, Achtung ("Attention" en allemand) Baby sonne toujours autant enthousiaste et fascinant, avec certains des meilleurs temps forts de la longue carrière de U2. One, pouvant, à mon sens, en être le meilleur, une balade soul sombre suintant la confrontation et la douleur parvenant à mettre au monde l’ADN musical américain à l’intérieur du soi irlandais sans la gravité du de Rattle & Hum ni ses chapeaux ridicule. Until the End of the World assure la reconnexion des rockeurs des années 1980 avec l’album de leurs débuts Boy ; mais, pardon pour le cliché, ils sonnent désormais comme des hommes, tenaces et même cyniques. Même lorsque U2 déploie sa dynamique de coure en salle pour Even Better Than the Real Thing et Who’s Gonna Ride Your Wild Horses, ces tentatives ne semblent pas vaines. Les débuts du ‘mirrorball’ de U2 pour The Fly s’ensuivait parce qu’alors le groupe ne connaissait ni la peu ni les précédents. A la sortie de son album Pop en 1997, il n’en allait plus de même, il doutait et avait tari la source Achtung Baby.
Les personnages secondaires que sont So Cruel, Acrobat et Love Is Blindness (ardeur plus mélancolique intimement lié au drame personnel vécu par The Edge à l’époque - son divorce) sont difficilement qualifiables d’"inférieurs". Le second CD de faces B et bonus manque de tout sauf de comparaison, Salome et la reprise revampée de Satellite of Love en feront voguer plus d’un. Mais l’on comprend mieux pourquoi l’inédit Blow Your House Down n’est pas parvenu jusqu’aux faces B : profondément moyen, si l’on considère la réinvention tous azimuts, ladite réinvention qui contribuait à faire revenir U2 dans la course pour embrasser la scène mondiale tout en retenant son âme (comme le feraient plus tard R.E.M. et Radiohead sans faire vaciller le style Rattle and Hum).
Mais attention, le seul combat perdu de U2 dans cette quête de la réinvention a été la censure du pénis de son batteur Adam Clayton figurant à l’intérieur de sa pochette, aujourd’hui barré d’une énorme croix noire qui ressemble beaucoup à de la censure chrétienne. Vingt ans plus tard ? Vraisemblablement plus comme 50 ans plus tôt !
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En savoir plus : BBC
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