On appelle ça un retour en force. Si c’est une pointe de scepticisme sur les capacités de U2 à me faire décoller à nouveau qui m’a accompagné sur la route du Stade de France en ce doux matin de septembre, ce sont des yeux brillants et débordants de bonheur qui ont vu les lumières se rallumer à la fin de ce 4ème concert français de la tournée 360. Difficile d’analyser les raisons pour lesquelles ce concert s’est placé largement au dessus des trois précédents. On pourrait évoquer la grande forme du groupe, leur envie et de toute évidence leur plaisir d’être là, l’ébullition d’un stade plein à craquer se donnant à fond pour l’unique concert de cette année, ou simplement les quelques mots si rares de Larry en fin de set. En tout cas, quelle qu’en soit la cause, une étincelle s’est rallumée samedi soir. Une étrange alchimie qui transmute parfois concert en performance.
Photo Bonoali pour U2France
Et ce fut palpable dès les premières mesures de Return Of The Stingray Guitar, nouvel instrumental d’introduction qui relègue Soon au rang de berceuse (merci Clad !) où l’on s’amuse à voir Bono courir dans tous les sens, scandant ’Allez, c’est parti !’ à 96000 spectateurs remontés à bloc. Si la présence de Beautiful Day en tout début de setlist reste discutable, le retour d’I Will Follow est contre toute-attente le premier moment fort du concert. Au moment où on pensait l’avoir trop entendue, presque enterrée par The Electric Co. ou Out Of Control sur les deux tournées précédentes, Bono lui reinsuffle la vie dans une version débordant d’énergie, relayée par le stade entier. Get On Your Boots profite de cet élan survolté, suivie de Magnificent, décidément très appréciée. Et celà n’est qu’un début, puisque U2 vont maintenir un très haut niveau sur les quatres titres suivants : Mysterious Ways que j’ai particulièrement appréciée et savourée. Etait ce dû à la superbe danseuse nue sur les écrans ? je m’interroge... Elevation, simplement énorme et digne de ses toutes premières apparitions, le retour judicieux de Until The End Of The World, au final toujours aussi réussi, et enfin I Still Havent’t Found What I’m Looking For. Quatre titres qui ont ce soir retrouvé un souffle nouveau alors qu’on pensait depuis longtemps en avoir fait le tour. Pourtant, pas de réinstrumentation, pas de snippet exotique ou d’artifices superflus. Rien de tout ça. Elles ont simplement parfaitement fonctionné, en accord total avec le public. Comme si la magie avait simplement opéré. Cerise sur le gateau, Bono présente le groupe : du "renard argenté" au "pasteur de la guitare", j’ai le sourire jusqu’au oreilles. Sacré bossu !
Alors que je prie à ce moment là de ne pas voir à nouveau débouler un Stuck in A Moment ou un Little While, U2 gratifie Paris de deux nouveautés, North Star toute en douceur, et Mercy reprise comme un hymne par le noyau dur de la fosse, et qui visiblement l’attendait depuis bien longtemps. Un joli moment d’innovation, néanmoins bien controlé, et plébiscité comme il le mérite. Et comme cela ne pouvait pas être parfait, In A Little While pointe le bout de sa truffe. Mais même cette dernière est finalement intéressante, puisque Bono fait monter sur scène une jeune fille du public, visiblement très troublée. Bono sort ses tripes et par la même occasion hérisse mes poils sur Miss Sarajevo, puis le set reprend une direction plus classique, mais toujours bien négociée, comme si rien ne pouvait gacher cette ’belle soirée’, comme dirait l’autre. City Of Blinding Lights, Vertigo, Crazy machin sur laquelle je ne m’étalerai pas au risque de me faire des ennemis, le Bloody Sunday national, et MLK qui annonce ce que j’appelerai le ventre mou du concert. Que Dieu Bono me pardonne, moi qui ai adulé Walk On et One à leurs débuts, mais j’ai le sentiment qu’un break s’impose pour ces deux là. Le même break qui nous prive de Pride et de Bullet depuis quelques temps, et qui nous permettra de mieux les apprécier à leur retour dans deux ou trois ans. Une pause nécessaire pour des titres trop entendus et qui ne se renouvellent que trop peu. Et ce n’est pas les bougies d’Amnesty ou le speech hilare de Tutu qui y changent quoi que ce soit. Pourquoi ne pas ressortir un bon vieux Bad ou un All I Want Is You à ce moment là ? Bon, ok, ce sera mon seul reproche à cette soirée presque parfaite. Where The Streets Have No Name, incontournable, arrive sur son éternel fond rouge et son flash de lumière (enfin, ça fait plutôt pétard mouillé depuis quelques temps, Willie aurait il mis des ampoules économies d’énergie ?), suivie de l’excellente Hold Me Thrill Me Kiss Me Kill Me, ou pour la première fois depuis deux heures, le Stade de France ne répond plus. Fatigue ou simple méconnaissance du morceau ? With Or Without You indique que la fin du concert approche, confirmé par l’arrivée de Moment Of Surrender, l’une des 4 derniers rescapées de la coupe franche très sévère infligée au dernier album en ce troisième leg du 360. Breathe, Unknown Caller ou No Line méritaient quand même mieux. Mais dans la mesure où un gros pourcentage de la setlist a été renouvellé, et ce notamment au profit de nouveaux titres, la pilule est plutôt bien passée. Et ce d’autant mieux que U2 nous a gratifiés d’un très grand concert, aussi bien dans leur musique que dans leur attitude. Que ceux qui n’y étaient pas se rassurent : U2 n’a pas encore dit son dernier mot. Preuve en est, leur retour prévu en 2011. L’énorme pince aurait décidé de vous tirer vers elle une fois de plus. Parlons franchement, si c’est pour un concert comme celui de samedi, je signe de suite.
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